Zoom sur Cuba II

Eh bé... Hier, après avoir lu la nouvelle à propos du Barbu, j'avais envoyé un mail à un ami Cubain pour lui demander ce qu'il en pensait, comment à son avis la situation allait évoluer... Il m'a répondu ceci:

Et bien, il existe une possibilité qu'il passe en retraîte. A mon avis, d'une façon ou d'une autre la plupart de gens veulent une amélioration du niveau de vie mais surtout  tranquilité ... pas de boulversements et à mon avis ça va se passer comme ça. On voudrais aussi que les choses s'arrangent entre cubains mais malheureusement il y a encore les US devant nous et en pleine période d'élections!! (et à Miami - Florida, ça bouge!!). De toute façon ici il semblerait que "ça bouge", mais doucement.

Puis, quelques heures après, il m'a à nouveau écrit pour me dire qu'il venait d'apprendre la nouvelle, que lors de son premier mail il n'avait pas encore lu les journaux ni écouté la radio (il est débordé en ce moment) et que du coup il ne savait rien parce que personne n'en parlait! Comme quoi... La vision extérieure que l'on a de Cuba comme d'un pays où la population est complètement opprimée et où les Cubains n'attendent que l'occasion de faire une révolution est assez erronée. Ca fait échos à ce que j'ai posté hier. Lorsque j'étais là-bas, j'ai souvent essayé de parler politique avec les gens, et en général ça n'allait pas très loin, à part avec Julio qui lui a beaucoup voyagé et a énormément de recul sur la situation. Mais je me souviens avoir demandé à un jeune Cubain ce qu'il pensait du régime et des libertés que lui et ses compatriotes n'avaient pas au quotidien (il venait de se plaindre de ne pas pouvoir sortir du pays comme il voulait). Il m'a répondu le classique "mais on a la santé et la scolarité gratuite", j'ai répondu qu'en France aussi, et il m'a dit texto "Oui, mais toi tu vis dans un pays capitaliste!". Lorsque j'ai voulu protester, ou tout du moins nuancer, il m'a fait comprendre d'un ton assez sec qu'il voulait qu'on parle d'autre chose (du coup ça a jeté un froid et on a plus parlé du tout). Pourtant ce type avait quoi, 23 ou 24 ans, était étudiant en médecine et avait le rare privilège de bénéficier d'un studio pour lui tout seul, c'était loin d'être le dernier cultivateur de tabac venu... (Je n'ai rien contre les cultivateurs de tabac, mais l'importance de la propagande que j'ai vu en me balladant un peu dans l'île doit fonctionner à merveille dans les petits villages de campagne... Enfin apparamment, dans les grandes villes aussi.) L'impression générale que j'ai eue est que si les Cubains ne vouent pas un culte de la personnalité à Fidel Castro (dont on ne voit la gueule nulle part) et si la jeune génération se sent de moins en moins concernées par des idéaux révolutionnaires datant des années 60, la réflexion qu'ils peuvent mener est souvent pauvre voire inexistante, et pour beaucoup d'entre eux le monde hors de Cuba est littéralement infesté par la vermine capitaliste (dont je faisais moi aussi partie, et je vous assure que c'est pas agréable, cette étiquette-là, surtout pour le portefeuille). Et je ne leur repproche absolument pas cette vision parce qu'ils n'en sont pas vraiment responsables, ce sont les idées qu'on leur fout dans le crâne à longueur de journée... Et ça donne ça:



Evidemment, je ne conteste pas, mais si la réflexion politique se limite à ça, c'est quand-même un peu dommage...

Et si vous voulez approfondir un peu, vous pouvez écouter pendant une semaine l'émission d'hier Et pourtant elle tourne de France Inter: http://www.radiofrance.fr/franceinter/em/etpourtantelletourne/